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PARTAGE D’UNE EXPÉRIENCE Écriture de l’ouvrage Maubec en Dauphiné – Tranches de vies au XXe siècle


Maubec en Isère[1] est une petite commune d’environ 1600 âmes limitrophe de Bourgoin-Jallieu, ville de taille moyenne (25 000 habitants). Les Maubelans ont pour habitude d’exposer le riche passé de la commune sur une large période allant de l’installation des Ibères au Xe siècle av. J.-C. à l’installation de Jean-Jacques Rousseau de 1769 à 1770, en passant par les guerres chevaleresques du Moyen Âge où les villageois pouvaient trouver refuge dans un château fort. Si bien qu’aujourd’hui, tout article de presse aborde systématiquement notre Jean-Jacques devenu si familier ou les restes du château englouti par les âges. Lorsque l’on parle de Maubec, on parle donc de la grande Histoire.

Dans cette logique, écrire un livre n’était pas la première idée des élus. Leur souhait relevait plutôt de l’urgence de conserver, d’immortaliser des us et coutumes en passe de disparaître. « Les anciens prennent le chemin du cimetière », m’a-t-on dit. C’est donc plus une approche « patrimoine » de collecte qu’un besoin de transmission. Mon travail a donc commencé par un recueil au sens strict, sorte de sauvetage d’un passé mal-en-point. Je tiens à préciser ce contexte, car il semble en effet que le rôle de l’écrivain public pourrait s’arrêter là, posant simplement par écrit ces paroles si précieuses.

Les représentants de la commission « culture » ont fait un travail important de repérage des personnes à interviewer en respectant autant que possible une parité homme/femme, les ont contactées pour leur expliquer ma prochaine venue. C’est donc en toute confiance que j’ai franchi le seuil de leur porte. Monsieur Bidaud, lui-même élu et passionné par l’histoire de son village, collectionneur de cartes postales et, donnée très importante, connu des personnes rencontrées, m’a accompagnée pour la plupart des rendez-vous. Un dialogue à trois s’instaurait. Je mesure encore mal si cette présence « imposée » a profité ou non à mon travail. J’en ai mesuré des avantages comme une entrée plus rapide dans certains sujets, une confiance permettant de délier les langues. Cependant, il m’a été difficile de conduire quelques entretiens et notamment d’aborder certains thèmes qui me tenaient à cœur.

Au fil de l’année, le volume de paroles ne cessait de croître. Les sujets abordés étaient variés, les anecdotes allaient bon train. Aussi, il m’a paru utile de découvrir ce que les archives pouvaient apporter de plus. J’ai perdu du temps en me rendant aux archives départementales. En effet, la période du siècle dernier n’y était pas encore. La plupart des informations intéressantes se trouvaient encore en mairie. Le document clé me semble-t-il, est le registre de délibérations du conseil municipal. Sa lecture est agréable du fait d’une écriture souvent très propre et régulière et les tournures soignées. Il vient mettre des dates sur des faits délivrés par les témoins. Les volumes archivés d’une petite commune se résumant à quelques cartons, j’ai pu parcourir rapidement des dossiers statistiques ou informations diverses sur les dispositions en matière de santé publique, activités économiques ou recensement. Classer ce volume d’informations ne m’a pas paru possible sans en faire des synthèses. À ce stade, mon travail de rédaction a commencé et l’écriture d’un ouvrage s’est imposée.

Le conseil municipal a accueilli favorablement cette perspective. Il m’a laissé champ libre pour la mener à bien. J’avais déjà effectué un nombre important d’heures d’interviews, de recherche et d’écriture, pourquoi ne pas aller plus loin ?

Les éditions Bellier ont accepté de publier l’ouvrage, sans grand risque il est vrai, car la publication serait effective à partir d’un certain niveau d’engagement des futurs lecteurs, par le biais d’un bon de souscription. « Les histoires locales et récits de vie sont dans l’air du temps », affirme madame Bellier qui en fait une partie non négligeable de son fonds de commerce. « Nous avons besoin de personnes comme vous. Mes clients recherchent des professionnels de l’écriture pour les aider dans leur projet ».

Mais pour l’heure, voici donc une tout autre histoire que les Maubelans content à présent ; une histoire récente, la leur. Par ce processus de l’ordre du don, les interviewés se sont affirmés dans un nouveau rôle social, en devenant la cheville ouvrière de la transmission mémorielle. Je souhaite que l’objet formalisé que constitue le livre fasse émerger cette nécessité de valorisation citoyenne sur d’autres territoires. Ce sera l’objet de mes prochaines démarches.

[1] À ne pas confondre avec Maubec dans le Tarn et Garonne et Maubec dans le Vaucluse.

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